Vendredy…
Oups, j’ai failli oublier. Vous êtes de sortie ce soir. Vous allez à cette soirée. Ok, si comme moi, vous habitez à 900 bornes du Pulp, vous avez une excuse valable. Dans le cas contraire…
Oups, j’ai failli oublier. Vous êtes de sortie ce soir. Vous allez à cette soirée. Ok, si comme moi, vous habitez à 900 bornes du Pulp, vous avez une excuse valable. Dans le cas contraire…
C’est peu de dire que la version cinématographie que Rent était attendue. Lorsqu’il a été annoncé, le choix du réalisateur a laissé perplexe. Chris Columbus est entre autres célèbres pour Maman j’ai raté l’avion ou un Harry Potter. L’histoire en bref : il s’agit d’une adaptation de La bohème de Puccini dans un New York (côté East Village) de la fin des années 80. La tuberculose dont sont atteints les protagonistes de La bohème est remplacée par le sida. Après avoir visionné le film, je ne sais pas vraiment quoi penser. L’histoire m’a accroché, malgré tout peut-être. C’est sûr que techniquement, y a pas mal de trucs qui clochent, comme le relève la fiche imdb du film.Pour ma part, je trouve le choix des chansons coupées assez judicieux. Certaines sont purement et simplement passées à la trappe, d’autres sont parlées plutôt que chantées (dont, dieu merci, ces horribles messages répondeurs qui servent de ponctuation). J’aurais peut-être sauvé Goodbye love, mais elle en aurait rajouté sans doute inutilement dans le pathos. Le seul défaut est sans doute qu’on a parfois l’impression d’assister à un enchaînement de chansons. Un peu plus de dialogue entre deux poussages de chansonnettes n’auraient pas fait de mal. Et avec ça, le film fait déjà 2 bonnes heures. J’ai apprécié aussi la volonté de garder le cast original. Seules deux actrices manquent à l’appel, les Mimi et Joanne de l’OBC, la première étant enceinte, et la seconde étant maintenant « trop vieille » pour le rôle (argument bizarre puisque tous les autres ont aussi 10 ans de plus, mais bon). On a donc appelé une star montante, Rosario Dawson, pour le rôle de Mimi. Si elle n’a pas une voix extraordinaire, elle tire malgré tout son épingle du jeu. Les autres jouent sur du velours, et même l’acteur qui joue Roger n’en fait pas des tonnes (alors qu’il était un peu pénible sur le CD de l’OBC). Wilson Jermain Heredia, qui joue Angel, le travesti, montre qu’il a bien mérité son Tony Award de l’époque. Les chansons sont égales à elles-mêmes, excellentes. Les voir enfin incarnées (je n’ai pas vu le musical, sinon sur un fichier DV pourri de e-mule), leur donnent une profondeur bienvenue, à l’image d’Another Day ou La vie bohème. J’espère que le film marchera en France aussi bien que Chicago et que le résultat sera le même : faire venir le musical sur scène, à Paris. Il existe une version française (québecoise) de Rent, il serait dommage de s’en priver.
Voici une (très) longue et très intéressante interview de Stephen Sondheim, datant de juillet 2005. On peut y voir notamment de nombreux extraits vidéos du compositeur, qui fêtait l’an dernier ses 75 ans. Il évoque de nombreux aspects de sa vie : son enfance, ses relations avec son mentor et "second père" Oscar Hammerstein II, sa manière d’écrire, et ses comédies musicales, bien évidemment, jusqu’à Assassins. Pas un mot sur les deux plus récentes, Passion et surtout Bounce, la seule qui ne soit pas parvenue jusqu’à Broadway. Il ne dit pas non plus si après l’échec de cette dernière il continue à écrire.
"It’s all in "Finishing the Hat."[from Sunday in the park with George] It’s all about trancing out,
and when you trance out properly, when the writing is… it’s not
necessarily going well, but when you’re completely in that world, there
is no other world, and so there’s no conflict."
C’est mon ami pointilliste qui m’a fait connaître cet aria tiré du Candide de Leonard Bernstein. Candide est moins une comédie musicale qu’une opérette jouée à Broadway. Créé en 1956, le show inspiré du Candide de Voltaire, n’a tenu que 73 performances à l’affiche. Barbara Cook y a créé le rôle de Cunégonde et ce faisant, l’un des arias réputés les plus difficiles de Broadway : Glitter and be gay. A écouter dans ma Radio Broadway (dans la colonne de droite). Depuis le flop des années 50, Candide a été réécrit maintes fois par plusieurs auteurs (dont Sondheim, pour quelques additional lyrics), il est aujourd’hui joué avec un livret de Hugh Weeler (auteur des livrets de A little night music et Sweeney Todd). La musique de Bernstein, dont c’est l’un des chefs d’oeuvre avec West side story, est sans doute plus appréciée que le show lui-même. Ecoutez également si vous en avez l’occasion la version de Glitter and be gay par Nathalie Dessay.
Parfois, on parle un peu vite. Prenez l’auteur de ce blog, par exemple. J’étais sûr d’avoir trouvé l’explication concernant le titre de Send in the clowns. Eh bien, en fait, j’étais à côté de la plaque. Pas très loin, mais à côté. J’ai trouvé la réponse sur Wikipedia, dans l’article consacré à la chanson. Je cite :
The title refers to a phrase reputedly used in a circus when an unforeseen disaster had occurred, with the clowns being sent in to distract the audience from the problem. Alternatively, the title could refer to the practice in vaudeville theatre of sending the clowns on to the stage to distract the audience after a particularly bad act.
Dont acte. Ca a tout de suite un peu plus de sens, non ? C’est la chanson la plus populaire et la plus enregistrée de Stephen Sondheim. Mes versions préférées sont dans le désordre, l’originale, tirée de A little night music, celle de Glenn Close dans Sondheim : A celebration at Carnegie Hall, et celle, peut-être la plus poignante, de Barbara Cook dans Mostly Sondheim.
Vendredi, j’ai mon premier rendez-vous à l’ANPE. Si pour vous aussi la journée de vendredi s’annonce pénible, je vous conseille vivement de vous rendre le soir-même au Pulp pour la soirée Androgyny, avec un blogeur célèbre aux goûts musicaux sûrs en DJ invité. Et si votre vendredi promet d’être réussi, filez-y aussi.
Une bien belle B.O. que celle de Brokeback Mountain. La musique originale est composée par Gustavo Santaolalla (quel nom formidable) et le reste est composé de reprises. Interprètes sans grande surprise : Emmylou Harris, Linda Ronstadt, Mary McBride et le squatteur de B.O. en chef Rufus Wainwright. Parmi les compositions originales ressort la belle ballade A love that will never grow old, chantée par Emmylou Harris. Parmi les reprises, j’ai choisi le vieux titre de Bob Dylan, He was a friend of mine, chanté par Willie Nelson. Dans le contexte du film, cette chanson prend un aspect particulièrement poignant.
Le cinéma sert encore à quelque chose. La preuve : hier je suis allé voir Brokeback Moutain pour le prix modique de 9,50 euros (j’ai quitté Paris il y a deux mois et c’était 9,10. 20 centimes chaque mois ce n’est plus de l’inflation, c’est presque un krach) et j’ai enfin compris d’où venait l’expression "Send in the clowns", qui sert de titre à la chanson la plus célèbre de Stephen Sondheim. Cette expression s’utilise dans un contexte de Rodeo. Dès que le cavalier chute, pour distraire la bête et éviter qu’elle ne le piétine, on envoie un ou des clowns, avec l’injonction, je vous le donne en mille, "Send in the clowns !". Pour resituer le contexte, la chanson de Sondheim fait partie de la comédie musicale A little night music. C’est le personnage de Désirée Armfeldt, une actrice middle-aged qui espère reconquérir son ex, qui la chante. Créé par l’actrice Glynis John, le titre a ensuite été repris par des dizaines d’artistes et continue de l’être régulièrement.
Accessoiremment, Brokeback Mountain est un très beau film. Si j’étais vous, je ferais en sorte de ne pas le rater.
Ok, vous l’aurez compris : j’ai tapé « Liza Minnelli » dans le moteur de recherche d’e-mule… Et j’ai rudement bien fait ! Car j’ai déniché une autre rareté, un medley chanté par Liza Minnelli et sa demi-soeur, Lorna Luft (fille de Judy Garland et Sid Luft), en 1993 à la cérémonie des Tony Awards, que Liza présente cette année là. Je ne connais pas toutes les chansons du medley, mais en plus de Not while I’m around, j’ai reconnu le If Momma was married deGypsy.
[Edit: 5 ans après ce post, il y a Youtube… 🙂 ]
Le ténor Mandy Patinkin est capable du meilleur comme du pire. Le pire, quand il surinterprète ses chansons, le meilleur, quand il revient à un peu de sobriété. Patinkin a reçu le Tony pour son interprétation de Che dans la création d’Evita à Broadway. Il a ensuite interprété Georges Seurat, dans le musical de Sondheim, Sunday in the Park with George. Par la suite, il a sorti plusieurs disques, donc celui que je chronique dans cette note. Contrairement à Bernadette Peters ou Barbara Cook, Patinkin ne fait pas du "Sondheim, etc." ou du "Mostly Sondheim". Il chante du Sondheim et rien que ça. Avec ses 34 pistes, le disque – live – balaie un large spectre d’oeuvres sondheimiennes, du moins jusqu’à la B.O de Dick Tracy, Assassins et Passion sont curieusement absents. Beaucoup de Sunday in the park, évidemment, mais aussi de Follies (il a chanté dans le concert revival de 1985) ou Company.Fidèle à lui-même, il donne le pire (You could drive a person crazy), comme le meilleur (Losing my mind, Sunday). Il aborde Broadway baby avec une sobriété inattendue et plutôt réussié, mais, le fourbe, c’est pour mieux balancer la purée à partir de "All over Times Square". L’effet est un peu raté, dommage. Agréable à écouter dans l’ensemble, à condition de passer à la chanson suivante de temps en temps.
Comme je ne me tiens pas forcément au courant de l’actualité musicale, j’ai eu vent de ce disque hommage à Tim et Jeff Buckley sorti en octobre 2005 en lisant la Blogothèque. Les albums tribute sont rarement bons ; quelque fois très bons, le plus souvent très mauvais. Dream Brother est une exception à la règle. Le choix des chansons que ce soit pour Jeff ou pour Tim est plutôt judicieux : quelques gros titres (Grace, Mojo Pin pour Jeff, Song to the siren, I must have been blind pour Tim), mais les autres, sans être des raretés font plaisir à entendre. Au rayon réussite, She is, de Tim par Sufjan Stevens, Morning theft, l’une des plus belles chansons de Jeff, par Stephen Fretwell (l’interprétation n’a rien d’exceptionnel, mais cette chanson est tellement belle, que même ratée elle demeure magnifique). Dream Brother (Jeff), I must have been blind et Song to the siren (Tim) valent aussi largement le détour. En revanche, Grace est carrément massacrée par un chanteur à l’oreille interne visiblement défaillante.
Mieux que Hello, Dolly. En 2001, la comédie musicale de Mel Brooks, The Producers, d’après un de ses films, a remporté pas moins de 12 Tony Awards, soit deux de plus que le musical de Jerry Herman, précédent recordman. L’histoire en bref : un vieux producteur de Broadway et un comptable aspirant producteur s’associent pour produire le pire musical de l’histoire de Broadway. En se débrouillant bien, ont-ils calculé, il y a plus d’argent à se faire avec un flop qu’avec un succès – à condition de se tirer très vite à l’étranger avec l’argent. Leo et Max, interprétés par Matthew Broderick et Nathan Lane, trouvent la pièce idéale pour faire un flop : « Springtime for Hitler ». Ils se mettent en quête du plus mauvais directeur de Broadway et ils tombent sur une vieille folle idiote, Roger DeBris. La chanson Keep it gay (dans ma Radio Broadway) est l’une de mes préférées :
MAX:
Listen, Roger: did you get a chance yet to read Springtime for Hitler?
ROGER:
Read it? I devoured it! I for one, for instance, never realized that the Third Reich meant Germany.
MAX:
Yeah, how ’bout that? Then you’ll do it?
Plus loin, Roger explique son point de vue dans la comédie musicale, il faut « keep it gay » et il faut un happy end :
ROGER & CARMEN:
A happy ending will pep up your play...
ROGER:
Oedipus won’t bomb…
CARMEN:
If he winds up with Mom!
Keep it gay!(…)
ROGER:
Of course that whole second act has to be rewritten. They’re losing the war? Excuse me. It’s too downbeat.
Roger a déjà quelques idées de mise en scène :
I see German soldiers dancing through France
Played by chorus boys in very tight pants
Roger dirige la pièce et finalement, le public prend Springtime for Hitler pour une comédie et c’est un succès. Après quelques péripéties, Leo et Max finissent en prison, d’où ils préparent leur prochain flop : Prisoners of love.
Après le succès à Broadway, un film devrait sortir courant 2006.
Après le succès de la première édition au Pulp, Androgyny revient le 30 décembre, même heure, même endroit. Je serai une fois de plus retenu loin de Paris, mais ce n’est pas une raison pour ne pas y aller. Et de toute façon, depuis quand vous n’avez pas entendu une aussi bonne musique dans un club, hein ?
Toutes les infos sont sur le blog officiel de la soirée.
Je suis actuellement en train de lire Stephen Sondheim : A life, la seule véritable biographie ("autorisée") de Sondheim, par Meryle Secrest. Ce livre, évidemment passionnant, raconte la genèse du génie de Stephen Sondheim, puis navigue au fil de ses oeuvres, de ses réussites (West Side Story, Gypsy, A little Night Music, Sunday in the park with George, etc.) et ses échecs (Anyone Can Whistle, Merrily, we roll along). La première partie du livre, qui revient sur la période allant de son enfance au début de sa vie d’adulte est la plus intéressante. Peu d’hommes ou de femmes n’ont eu autant d’atouts en main pour réussir dans le domaine artistique : famille aisée, qui peut payer des cours de musique et l’envoyer dans de bonnes écoles, mère juive abandonnée qui devient monstrueuse – de quoi donner une bonne névrose favorisant l’inspiration, relations en or – il est ami avec les enfants des deux hommes ayant révolutionné la comédie musicale américaine, Oscar Hammerstein II et Richard Rodgers (Hammerstein le prendra d’ailleurs sous son aile), coups de bol : rencontre avec le dramaturge Arthur Laurents qui convainc Leonard Bernstein et Jerome Robbins de lui confier les paroles de West Side Story… L’anecdote la plus célèbre est sans doute celle de By George, la toute première oeuvre de Sondheim, écrite pour son lycée, alors qu’il n’a que 15 ans. Il la montre au père de son ami Jamie Hammerstein et lui demande crânement de la lire et de la critique comme si c’était du travail professionnel. Verdict du maître : "C’est la pire chose que j’aie jamais lue". Devant la perplexité et l’abattement de son jeune interlocuteur, Oscar Hammerstein ajoute : "je n’ai pas dit que c’était sans talent, mais que c’était mauvais. Si tu veux savoir pourquoi c’est mauvais, je t’expliquerai." Stephen Sondheim dit qu’il a alors appris plus sur l’art de faire des comédies musicales en une après-midi que la plupart des auteurs en toute une vie. L’influence d’Hammerstein ne s’arrête pas là. Il lui donnera des exercices et critiquera ses premiers travaux. Le mentor mourra toutefois avant que son élève produise sa première véritable oeuvre, A funny thing happened on the way to the forum. A partir de là, la biographie demeure très prenante, mais devient un poil plus académique et pourrait être finalement celle de n’importe quel autre acteur du show business de Broadway. Autre anecdote, révélatrice d’un autre trait de caractère de Sondheim : l’arrogance. Alors qu’il a la vingtaine, raconte Meryle Secrest, on emmène le futur compositeur chez Cole Porter, alors handicapé et vieillissant. Sondheim, qui avait composé une parodie de chanson de Porter, intitulée La Bordelaise, se met crânement au piano et interprète sa parodie. Porter reste stoïque et se contente de lui conseiller de rallonger la fin, parce que c’est ce que lui fait toujours. "Le pauvre, il savait exactement ce que je faisais", commentera Sondheim.
Suite des commentaires au prochain épisode.