Rufus Wainwright – Trianon, le 22 mai
Après la déception de l’Olympia et la semi-déception de son dernier album, on avait peur d’avoir perdu le Rufus Wainwright flamboyant qu’on aimait. Bonne nouvelle : on l’a retrouvé. Rufus était très en voix hier soir au Trianon et les chansons de son dernier album passent nettement mieux en live, mention spéciale pour le morceau d’ouverture Do I disappoint you ?. Between my legs et Rules and Regulation sont sans doute amenés eux-aussi à devenir des "old favorite", pour reprendre son expression. Et il n’est guère besoin de faire référence à Going to a town, aussi bien en live que sur disque. La mini-section cuivre, au look improbable, qui l’accompagnait est sans doute pour beaucoup dans ce succès.
Par ailleurs, le chanteur s’est excusé de sa prestation à l’Olympia ("c’était génial !", a crié une idiote) et a interprété deux morceaux du concert Garland, A foggy day et le très beau If love were all. Pour faire une parenthèse, je suis maintenant moins indulgent qu’à l’époque à l’égard de cet Olympia. Rufus, grand amateur d’opéra sait bien que le public est impitoyable lorsqu’un chanteur lyrique massacre un titre du répertoire ou qu’une mise en scène est ratée. Pourquoi doit-il en être autrement pour un chanteur pop ? Vu le prix des billets, il aurait été légitime qu’au lieu de faire une standing ovation ridicule, la salle crie "Remboursez !". Bref.
En dehors des chansons du nouvel album – joué dans son intégralité -, Rufus a joué quelques classiques : Beautiful child, Pretty Things, 14th street (ma préférée) et Harvester of hearts.
Et enfin, un concert de Rufus sans séquence déguisement n’étant pas vraiment un concert de Rufus, le chanteur a régalé la salle avec son interprétation (en playback) du classique de Judy Garland, Get happy (tiré de Summer Stock), costume et maquillage compris (photo). Rufus martyrisé, Rufus outragé, mais enfin Rufus libéré par sainte Judy. On a eu peur, vraiment.
Mais que diable a-t-il donc commis lors de son dernier passage à l’Olympia ?
Entièrement d’accord, les chansons les plus douteuses du dernier album passent beaucoup mieux en concert, non seulement Do I disappoint you?, plus âpre et dissonnant, mais aussi Tulsa, dont l’instabilité rythmique est plus saisissante dans une version piano ramassée et virtuose que diluée dans les méandres d’un orchestre kitsch (pour le coup, vive Joanna Newsom).
Mais est-ce le manque de familiarité avec les nouvelles chansons, ou la fadeur de nombre d’entre elles? Si j’ai retrouvé la voix de Rufus, qui manquait tant à l’Olympia, je n’ai pas ressenti l’émotion qui se dégageait, par exemple, lors de son passage au Nouveau Casino…
Les figures imposées de la promo lui pèsent-elles? J’ai du mal à croire qu’il s’illusionne totalement sur l’intérêt de chansons comme Not ready to love (tellement Want!)… Et pourtant, il se prépare attremment à sortir Rules and regulations en deuxième single, a-t-il définitivement perdu tout sens du ridicule?
L’article de Pitchfork sur Release the stars est très juste, avec lui, le meilleur est toujours à venir… J’attends l’opéra pour le Met……